Cette première édition du CHSCT ministériel de la nouvelle mandature (2019-2022) était présidée par Patrick Soler, inspecteur général de l’agriculture, ancien secrétaire général adjoint de France-Agrimer. La CFDT était représentée par Martine Girard, Stéphanie Clarenc et Jean-François Le Clanche.
Lors de sa déclaration liminaire, Patrick Soler a reconnu la qualité du travail et de l’expertise développée par les membres du CHSCT-M. Son objectif est de maintenir le cap et de continuer à agir en faveur des agents pour qu’ils « se sentent bien et travaillent avec efficacité ». Il souhaite que les relations humaines entre les différents acteurs s’améliorent et que les tensions s’apaisent. Si par exemple le télétravail est une réponse parmi d’autres, il attire l’attention sur les évolutions récentes qui conduisent à l’imbrication de plus en plus fréquente entre temps de travail et temps privé. Dans un contexte de travail qui évolue rapidement, la santé et la sécurité au travail sont un défi majeur pour les acteurs de prévention.
Déclaration liminaire de la CFDT incluant les réponses du président
La CFDT rappelle son attachement au maintien de véritables instances pour un dialogue social constructif autour des conditions de travail et de la qualité de vie au travail, qui restent ses priorités. À ce titre, elle rappelle qu’elle n’est pas favorable à la fusion des instances (comité technique et CHSCT) souhaitée par le gouvernement et qu’elle a voté contre la loi de transformation de la Fonction publique.
Patrick Soler affirme vouloir maintenir le niveau d’ambition qui anime cette instance et d’en montrer tout l’intérêt dans le contexte actuel de la réforme de l’État.
Durant cette nouvelle mandature, les nombreux travaux déjà engagés devront être poursuivis et de nouveaux dossiers devront être portés dans cette instance.
Aussi, la CFDT demande qu’un groupe de travail puisse définir le nouveau programme national de prévention (PNP) dans un esprit de co-construction. Durant ces travaux, la CFDT sera attentive à la poursuite de l’ensemble des actions démarrées et non finalisées lors de la précédente mandature, tels que les TMS dans les abattoirs, le risque chimique lors des contrôles intrants, les espaces de dialogue et de discussion.
Le président affiche sa volonté de travailler ensemble à l’élaboration du PNP de cette nouvelle mandature. Dans un premier temps, un groupe de travail sera réuni avec la participation du secrétaire du CHSCT-M.
Sur ce dernier dossier, la CFDT rappelle son attachement aux EDD. Elle demande de généraliser ces espaces pour les agents qui en font la demande et attire le regard de l’administration pour mobiliser cet outil dans le cadre des fusions à venir des écoles d’enseignement supérieur. La CFDT incite les services à organiser ces espaces afin d’assurer une qualité de vie au travail satisfaisante et diminuer les risques psycho-sociaux (RPS), tout particulièrement lors des réorganisations ou regroupement de services. L’objectif de la diminution des RPS passe également par la réalisation d’un diagnostic dans l’ensemble des structures, la mise en place d’un plan d’action et d’un suivi de ce plan. Or, la CFDT constate que, même si le diagnostic a été réalisé dans de nombreuses structures, les plans d’action associés sont souvent absents ou non suivis d’effet.Elle demande un bilan (diagnostic, plan d’action, suivi du plan d’action), a minima pour l’administration centrale, les DRAAF et les établissements de l’enseignement technique et du supérieur.
En outre, la CFDT souhaite avoir communication des plans RPS en DDI et chez les opérateurs nouvellement intégrés au CTM. Le ministère de l’Agriculture doit s’assurer que ses agents bénéficient de conditions de travail analogues quelle que soit leur affectation.
Le président rappelle que la prévention des risques psycho-sociaux est une préoccupation du ministre et du secrétariat général. De nombreuses actions sont en cours. Les suites du baromètre social vont également enrichir ce plan d’actions. Il est prévu de réaliser un audit sur les mesures de prévention des RPS afin d’en mesurer l’efficacité.
La CFDT constate avec satisfaction que la réflexion est engagée pour améliorer les conditions de reprise de fonction après un CLM ou un CLD. La CFDT sollicite l’instauration d’un accompagnement personnalisé. Cet accompagnement doit permettre de faire le point sur la situation de l’agent et d’identifier les attentes respectives de l’agent et des services, les contraintes et les points de vigilance, dans l’objectif d’un retour dans de bonnes conditions, y compris à temps partiel thérapeutique.
Malgré tous les efforts des secrétariats généraux des structures, la CFDT constate avec regret que toutes les directions ne bénéficient pas à ce jour de la médecine de prévention. La CFDT sollicite un nouveau point d’avancement précis, région par région, pour connaître les structures qui ne bénéficient pas de médecine de prévention. Comment se sont-elles organisées pour que les agents qui connaissent des situations particulièrement sensibles, telles qu’une RQTH, puissent bénéficier d’une visite si besoin ?
L’administration précise que le bilan de la médecine de prévention requiert un investissement important. Faute de centralisation des données, un questionnaire doit être envoyé à chaque structure. Les ISST peuvent répondre à de nombreuses questions, mais certaines relèvent de la structure et des différentes conventions passées, souvent très disparates. En cas d’urgence, il est parfois possible de passer par la médecine de prévention d’une autre structure du département. L’absence de médecine de prévention en DDI devrait faire partie des négociations en cours pour la mise en place de secrétariats généraux communs. La DGAFP travaille sur la réforme du décret portant sur le rôle des médecins et de la médecine de prévention.
Concernant la mise en place, à titre expérimental, de la vidéosurveillance en abattoir, la CFDT réaffirme sa position quant à l’installation de caméras, qui ne doit pas être un substitut au déficit de moyens humains dédiés au bien-être animal.
La DGAL rappelle que c’est la loi Egalim qui introduit la possibilité de mettre en place une expérimentation de vidéosurveillance afin d’évaluer l’efficacité des protocoles et l’application de la réglementation du bien-être animal. L’expérimentation, ouverte aux structures volontaires, vise à conforter l’auto-contrôle, par la mise en place de caméras permettant de suivre les manipulations des animaux lors des saignées et de la mise à mort. Le décret a pour objectif d’encadrer le respect de la confidentialité des données. À ce titre, il prévoit de conserver les enregistrements durant un mois. Les services vétérinaires peuvent visualiser ces vidéos sur demande, en cas de besoin. Le professionnel peut aussi autoriser des personnes issues du monde de l’audit ou du conseil à visualiser ces vidéos en présence d’un personnel habilité des abattoirs. La CNIL a été saisie et son avis est attendu. Le CSE de l’abatteur doit rendre un avis conforme. Le CHSCT des agents du MAA concernés doit être informé et l’information des agents est obligatoire avant la mise en place du dispositif. Une évaluation de l’expérimentation aura lieu et sera suivie par un comité de pilotage. La DGAL a également prévu de publier une note de service afin de cadrer l’utilisation de la vidéosurveillance au regard du RGPD, qui sera valable dans tous les cas de vidéosurveillance, expérimentation ou non.
La CFDT demande que la DGAL incite fortement les professionnels à mettre en place un système automatique de floutage des visages afin de garantir le droit à l’image des agents ainsi filmés.
Fonctionnement du CHSCT-M
Après approbation du règlement intérieur, les représentants au CHSCT-M procèdent à l’élection des secrétaire et secrétaire adjoint. Sont élus respectivement Soizic Blot et Erwann Coppere. Les points à l’ordre du jour ont ensuite été évoqués.
Plan national de prévention (PNP) 2016-2018 : un plan à poursuivre sur le terrain
Le PNP est à l’origine d’une production importante de connaissances et d’outils innovants. Un nombre important d’actions ont été mises en œuvre durant les années précédentes. Ces actions couvrent des thématiques essentielles pour la CFDT :
— l’amélioration de la qualité des équipements de protection individuelle des agents ;
— la prévention des RPS, l’amélioration de la qualité de vie au travail ;
— l’insertion au sein du ministère des travailleurs ayant un handicap ;
— la possibilité offerte aux agents de s’exprimer sur l’organisation de leur travail et de leur service via la création d’espace de dialogue (EDD) ;
— la prévention du harcèlement moral et sexuel ;
— la disparition des discriminations liées au genre, à l’appartenance ethnique ou à l’orientation sexuelle ;
— etc.
Des ressources validées par le CHSCT-M ont été également produites et mises à disposition des agents :
— guide de prévention des violences au travail ;
— outil de formation en ligne tels que « mon CHSCT en 36 questions » ;
— développement d’un jeu sérieux « Tous Caps » destiné aux agents et aux élèves des EPL (voir également notre compte rendu du CHSCTM du 12 décembre 2017) ;
— diffusion de nombreuses affiches de prévention ;
— cellule d’écoute et numéro vert d’appel ;
— baromètre social ;
— etc.
Des séminaires, des colloques, des actions de formation ont été régulièrement organisés pour améliorer les compétences des acteurs SST (assistants de prévention, secrétaires généraux…) dans le domaine de l’évaluation des risques professionnels.
La CFDT considère que ces actions vont dans le bon sens et méritent d’être développées sur le terrain. Si ces actions sont importantes en nombre, elles ne traduisent pas assez la réalité du quotidien de certains agents. Ce sera un des enjeux de l’élaboration du prochain PNP.
Plan d’accompagnement des SEA : après l’accalmie, des signes de tempête pointent à l’horizon
La CFDT a alerté à maintes reprises le ministère sur les conditions dégradées des agents exerçant leur activité dans les SEA. Depuis quelques semaines, des signaux inquiétants laissent à penser que la situation des SEA, après une période d’accalmie relative, pourrait se dégrader à nouveau. En effet, les retards pris sur la bio, les audits de l’UE et le risque d’apurement associé, le calendrier de télédéclaration très contraint, les logiciels peu ergonomiques, pas adaptés et peu performants, et les demandes de remboursements aux agriculteurs de trop-perçu sont sources de tensions pour ces agents.
Pour le bilan du plan d’accompagnement, l’administration souligne :
— des recrutements importants de contractuels en CDD ;
— la mise en réseaux des agents des SEA, de groupes utilisateurs, la mutualisation des expériences et des expertises (Retex, etc.) ;
— l’amélioration au fil de l’eau des logiciels Isis et Osiris (changement de prestataire possible courant 2019), de Telepac. (Pour la CFDT, Osiris, notamment, est un logiciel peu intuitif, peu ergonomique et le manuel d’accompagnement est incomplet.) ;
— une gestion des ressources humaines volontariste, se traduisant par un appui au fil de l’eau des agents et sur demande (tutorat, appui de l’Igaps) ;
— la volonté de promouvoir une culture du travail d’équipe interdépartementale.
Si certains de ces points présentent des aspects positifs, ils restent largement insuffisants. La CFDT et les autres organisations syndicales présentes (FO, Unsa) lancent une alerte sur la situation de ces agents.
L’administration indique qu’elle prend bien en compte cette alerte intersyndicale. D’ailleurs, un premier groupe de travail est prévu le 16 avril prochain et des actions seront à inscrire dans le programme national prévention.
Baromètre social : quelle suite ?
Le baromètre social a fait l’objet d’échanges sur l’exploitation des données recueillies, notamment en séminaire avec les représentants des DRAAF et de l’administration centrale. Les suites données à ce baromètre social s’orientent vers :
— la réalisation d’un bilan plus qualitatif du télétravail ;
— la mise en place d’une fiche de transmission par l’agent qui quitte son poste suite à une mobilité afin de faciliter la prise de poste de l’agent qui lui succédera ;
— la diffusion systématique des comptes rendus des comités de direction ;
— la mise en place d’une fiche réflexe en cas de situation difficile afin de tracer l’intervention des acteurs de la prévention ;
— l’expérimentation des espaces de dialogue et de discussion (EDD) : les volontaires pourront se faire connaître dès la parution de la note de service, annoncée pour avril 2019.
Il est prévu de renouveler l’enquête « baromètre social » auprès des agents en 2020.
La CFDT approuve l’ensemble de ces pistes, et particulièrement les espaces de dialogue et de discussion. Elle demande que la mise en place de ces espaces soit fortement incitée en cas de projet de réorganisation ou de fusion.
Action de prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS) des agents en abattoir : des actions sont en cours mais il reste du chemin à parcourir
Ce plan est développé selon 4 axes et a fait l’objet d’un suivi (état d’avancement du 15 février 2019) :
— axe 1 : création d’un réseau de compétences de 11 agents « experts » intervenant en abattoir. Pour être membre de ce réseau il faut travailler en abattoir (vétérinaires et techniciens) et être formé ;
— axe 2 : formation. En 2018 une formation de « e-learning » a été proposée aux agents travaillant en abattoir. Il y a eu 759 inscrits et 316 formés pour 1700 agents ciblés ; 90% des agents formés déclarent avoir acquis des compétences et recommandent cette formation, considérée par la quasi-totalité des formés comme étant adaptée à leur profil ;
— axe 3 : formation-développement et « workshop » sur la conception et la reconception des chaînes en abattoir, dans le cadre d’un partenariat avec l’université Clermont-Auvergne. Il s’agit de créer un réseau d’agents sur ce sujet avec des réunions où tout le monde participe activement. Le sujet est défini à l’avance par les organisateurs, tout comme l’objectif : construire une réflexion, trouver une idée, partager un savoir particulier, etc. De plus en plus, les établissements d’enseignement s’emparent du concept. Parallèlement, le marché avec le cabinet d’ergonomie a été passé, ce qui va permettre la réalisation des premières études sur ce sujet ;
— axe 4 : expérimentation d’EDD en abattoirs.
Pour la CFDT, les conditions de travail des agents demeurent toujours aussi difficiles. La prévention des TMS doit rester une priorité. Parallèlement, la CFDT souhaite la mise en place d’un dispositif permettant d’offrir aux agents en souffrance la possibilité de se reconvertir s’ils le souhaitent.
Bilan des « agressions signalées » : une augmentation sans explication…
D’après les remontées de terrain enregistrées par l’administration, on constate une augmentation importante du nombre de signalements, notamment au niveau des EPL. Sans explications certaines sur cette augmentation, on peut penser que des remontées plus systématiques peuvent l’expliquer, au moins partiellement. Lorsqu’une fiche de signalement remonte, un soutien psychologique est systématiquement proposé (mais sur 98 cas recensés, seuls 14 agents ont accepté cette proposition). À noter que la possibilité d’être accompagné reste toujours possible a posteriori.
Pour la CFDT, une campagne de communication forte doit être à nouveau menée sur ce sujet. En effet, trop d’agents ignorent encore le processus de déclaration des agressions et ne les déclarent donc pas. Cette déclaration permet pourtant à la structure d’en prendre connaissance et de mettre en œuvre les mesures de prévention nécessaires pour l’agent et la communauté de travail. La déclaration permet également à l’agent de bénéficier d’un soutien psychologique, s’il le souhaite. L’expérience montre que certains EPL sont mal informés sur l’existence de ce dispositif.
Le Brexit : un dispositif qui se construit dans un contexte d’incertitudes
L’administration convient que le rétablissement d’une frontière entre la France et la Grande-Bretagne, dû au Brexit, va avoir de nombreux impacts sur notre vie quotidienne mais aussi sur le travail de certains agents du ministère, avec la mise en place de contrôles aux frontières. Dans ce contexte, 50 ETP ont été recrutés pour assurer le contrôle des marchandises aux postes frontaliers. Ils ont notamment été formés aux risques professionnels et ont été destinataires du document « Fiches réflexes de l’inspecteur en SIVEP » reprenant les consignes permettant de se prémunir du risque chimique associé à ce poste de travail.
> Pour en savoir plus sur le dispositif de contrôle prévu dans le cadre du Brexit, consultez notre article.
Réorganisation des centres d’examen : la réflexion est en cours…
Interpellé par la CFDT sur la réorganisation des pôles régionaux d’examens, le représentant de la DGER estime que les équipes régionales sont fragiles en raison d’un dispositif trop souvent animé par très peu de personnes. La DGER a la volonté de sécuriser le dispositif. Le projet de réorganisation n’est pas encore finalisé et des groupes de travail sont en cours. L’objectif est d’harmoniser et de simplifier le dispositif en créant des équipes à taille humaine sur une échelle territoriale différente. Enfin, les réformes du bac et de l’apprentissage sont en cours. La DGER a indiqué que les équipes pédagogiques et les CFA vont être accompagnés. Des moyens d’accompagnement sont débloqués (1 million d’euros pour l’apprentissage) à cette fin.
Séminaire « prévention des risques techniques dans la recherche »
Un deuxième séminaire consacré à la prévention des risques techniques dans la recherche est organisé à Vetagrosup à Lempdes, les 2 et 3 avril 2019. Le programme a été co-construit par les acteurs de la prévention du ministère et leurs partenaires. Cette manifestation fait suite aux premières journées portant sur le risque chimique, organisées en novembre 2016.
La CFDT a suggéré de valoriser ces journées par le biais de la mise en ligne de séquence vidéo présentant l’essence des interventions qui auront lieu.
Cette proposition est en réflexion pour le prochain séminaire.